RIMBAUD AUX SIENS

Harar, 13 décembre 1880.

Chers amis,

Je suis arrivé dans ce pays après vingt jours de cheval à travers le désert Somali. Harar est une ville colonisée par les Égyptiens et dépendant de leur gouvernement. La garnison est de plusieurs milliers d’hommes. Ici se trouvent notre agence et nos magasins. Les produits marchands du pays sont le café, l’ivoire, les peaux, etc. Le pays est élevé, mais non infertile. Le climat est frais et non malsain. On importe ici toutes marchandises d’Europe, par chameaux. Il y a, d’ailleurs, beaucoup à faire dans le pays. Nous n’avons pas de poste régulière ici. Nous sommes forcés d’envoyer notre courrier à Aden, par rares occasions. Ceci ne vous arrivera donc pas d’ici longtemps. Je compte que vous avez reçu ces 100 francs, que je vous ai fait envoyer par la maison de Lyon, et que vous avez trouvé moyen de me mettre en route les objets que j’ai demandés. J’ignore cependant quand je les recevrai.

Je suis ici dans les Gallas. Je pense que j’aurai à aller plus en avant prochainement. Je vous prie de me faire parvenir de vos nouvelles le plus fréquemment possible. J’espère que vos affaires vont bien et que vous vous portez bien. Je trouverai moyen d’écrire encore prochainement. Adressez vos lettres ou envois ainsi :

M. Dubar, agent général à Aden.
Pour M. Rimbaud, Harar.